mercredi 20 octobre 2010

La tête hors de l'eau, de Dan Fante


(Mooch, 1988)
Christian Bourgois, 10/18, 2001, 222 p.

Je n’ai d’autre choix que de tomber ici dans le piège malheureux mais inévitable de la comparaison. Car jamais je ne me serais arrêté sur Dan Fante s’il n’avait été le fils de John Fante, qui compte parmi mes écrivains favoris. Même si, lorsqu’on parle de Dan Fante, on réfère à Bukowski et à Selby. Un moment donné, ça fera, les comparaisons avec Bukowski. Chaque personnage alcoolique dans un roman amène maintenant la référence à Bukowski. Il y a longtemps que j’ai arrêté de m’exciter pour des choses comme ça.

La comparaison, donc. J’aimerais bien savoir le nombre de personnes qui ont pu lire Fante fils sans connaître le père. L’alter-ego du père s’appelait Arturo Bandini, celui du fils, Bruno Dante. D’un côté comme de l’autre, le caractère autobiographique transpire de chaque mot écrit. La misère, l’alcool, l’errance, les femmes tout sauf faciles et, quelque part derrière tout ça, de grandes espérances d’écrivain. Dans « Demande à la poussière », le plus grand titre du père (le livre qui donna à Bukowski l’envie d’écrire), Arturo Bandini a écrit une nouvelle, « Le petit chien qui riait » et compte sur son texte pour se faire révéler au monde. Ici, pour Bruno Dante, c’est sa nouvelle « Comptabilité » qui est l’assise de toutes ses espérances. Les deux personnages s’acharnent sur ce qui est déjà écrit, et jamais, au cours du roman, les verrons-nous s’asseoir à la machine et peaufiner leur art. Faut dire qu’un roman sur un gars qui est en train d’écrire, ça peut vite tomber déprimant.

Dans ses aventures précédentes, « Les anges n’ont rien dans les poches » et « En crachant du haut des buildings », Bruno Dante fout la merde, comme Dan Fante l’a probablement fait avant d’arrêter l’alcool. « La tête hors de l’eau » est le troisième roman de la série, le premier que je lis. Ici, Dante devient sobre et se trouve un boulot dans une boîte de télémarketing qui n’engage que des ex-alcooliques et drogués. Tout ce qui se passe à l’intérieur de ces murs est particulièrement lassant, exception faite de sa rencontre avec Jimmi Valente, une ex-crack addict, prostituée, plus vulgaire que le Doc Mailloux, plus imprévisible que Carey Price. Mais la sobriété va et vient au rythme des histoires impossibles qui se chevauchent. Et c’est l’amour que Bruno porte à Jimmi qui parviendra à le remettre en quelque sorte sur le droit chemin, malgré tous les coups bas qu’elle lui porte.

J’ai lu ce livre davantage pour ma culture personnelle que pour mon divertissement. Autrement, je n’aurais pas mis un mois à traverser 222 pages. La fin m’a plu, oui. En fait, une autre fin aurait été fort décevante. C’est plate mon Dan, mais tu passes en deuxième. Si je veux lire du Fante, je vais relire ton père. Si je veux lire du Bukowski, je vais relire Bukowski. Et si je veux lire Selby… bah, j’ai pas envie de lire Selby.

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