dimanche 24 avril 2011
La loi de la seconde chance, de James Sheehan
(Laws of second chances, 2008)
Belfond noir, 2008, 439 p.
Objection!
James Sheehan est avocat en Floride et La loi de la seconde chance est son deuxième roman, après Le prince de Lexington avenue paru et traduit l’année dernière. La raison pour laquelle les éditions Belfond font preuve d’autant d’assiduité face à cet auteur doit relever de ces petits caractères à la fin d’un contrat. Lorsqu’on parle d’engorgement dans les librairies, du nombre trop élevé de parutions par rapport à la demande du lectorat, le livre de Sheehan est ce genre d’erreur qu’on aurait pu éviter aux lecteurs francophones. Et tant pis pour les Anglais.
En soi, l’intrigue de ce livre en est une comme on en voit dans un grand nombre de romans judiciaires. Jack Tobin est un avocat (riche et talentueux, tiens donc) qui se consacre à la défense des condamnés à mort. Après avoir sauvé in extremis la vie de Henry Wilson qui faisait face à la peine capitale suite à dix sept années passées en prison pour un meurtre qu’il n’avait pas commis, Tobin se penche sur le cas de Benny Avrile, le fils d’un vieil ami à lui, accusé du meurtre de Carl Robertson, un magnat du pétrole (une huile, comme dit l’auteur, la pognez-vous?). Bien que je ne sois pas amateur ni connaisseur d’intrigues judiciaires, je peux affirmer sans hésiter qu’il s’agit là d’une honte au genre et que les afficionados ont intérêt à passer leur tour.
Histoire ficelée avec de la grosse corde jaune, subtile comme une déneigeuse dans un quartier résidentiel, La loi de la seconde chance m’a presque donné envie de lire un polar de Nora Roberts, pour me convaincre que la dame est un grand auteur de noir. Le roman est écrit dans une langue éducative qui s’étire en longueurs et qui prend le lecteur pour un enfant. Comme dans ces interminables scéances où Tobin revient à la campagne après ses dures journées en ville et que sa femme l’attend avec un bon repas. Mais d’abord, faire un parcours de jogging et se raconter sa journée. Suivent alors d’insipides échanges entre deux personnes si amoureuses après tant d’années, où Tobin décrit à la femme de sa vie les méandres de l’affaire juridique en cours. Tout cela en gardant un rythme de course parfait et en s’extasiant sur les beautés de la nature. Mais ce bonheur ne saurait durer, la femme de Tobin trouvant vite la mort des suites d’un cancer féroce. Dure épreuve, pas de doute, mais Sheehan veut tellement s’assurer que le lecteur ait des émotions que le tout aura vite tourné à la comédie.
Je pourrais remplir quelques pages à soulever les incohérences de ce roman, mais je ne m’attarderai encore que sur un point, avant de laisser traîner ce livre dans un endroit public et de partir sans jamais me retourner. Sheehan nous explique vers la fin du roman les procédures d’un examen balistique, et pour être certain que son lecteur comprenne, il nous le décrit très clai-re-ment. Soit. Mais qu’une quinzaine de pages plus loin, Tobin s’entretienne avec un expert en balistique qui lui dit « Vous savez sans doute comment on procède pour déterminer si une arme a servi pour commettre un crime, mais je vais quand même vous l’expliquer » et qu’il remette ça, ça devient carrément insultant.
Mais le sentiment qui persiste après la lecture ardue de ce livre (hé, je n’ai pas sauté une ligne), c’en est un de tristesse pour les personnages, qu’ils soient tombés entre les mains d’un auteur mièvre, sans pouvoir donner leur avis. Pas de seconde chance. Pour ma part, j’ai donné sa chance à Sheehan, et en bout de compte, c’en était déjà une de trop.
(Critique écrite pour Alibis, hiver 2008)
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