dimanche 24 avril 2011

Le baiser du tueur, de William Lashner


(A Killer’s Kiss, 2007)
Du Rocher, 2009, 296 p.



Les troubles des anciennes amours


Avec Le baiser du tueur, William Lashner signe sa septième aventure avec Victor Carl, son attachant personnage d’avocat basé à Philadelphie, spécialiste de la racaille et des honoraires non payés. « Après le septième roman, il se reposa », pourrait-on dire, car Lashner nous informe en épilogue qu’il laisse tomber Victor Carl un bout de temps, histoire de le laisser vivre un peu. Car ces sept aventures n’ont rien eu de reposant pour l’avocat, qui a une certaine propension à la provocation et aux répliques assassines qui lui valent souvent d’élargir sa collection de cicatrices.

Je n’en suis encore qu’à ma deuxième rencontre avec Victor Carl, et de savoir que la production s’arrêtera un temps me donne le goût de faire du rattrapage pour en venir, dans quelques années, à attendre le nouveau Lashner avec impatience.

C’est que Lashner a un ton, une attitude que l’on retrouve avec bonheur et réconfort. Victor Carl est un personnage cinglant et cynique, autant sous la table qu’à découvert. Pas toujours au pied avec la loi – même en cour – il connaît ses droits et sait comment faire entorse aux règles établies. Et s’il faut en plus que ses problèmes soient d’ordre personnel, les principes de Carl foutent carrément le camp.

Ici, on le voit renouer avec Julia Denniston, son ex-fiancée qui l’avait plaqué là quelques années auparavant pour un urologue. Un urolgue. Difficile de s’en sortir avec dignité. Quoi qu’il en soit, l’éponge est visiblement passée, car Julia est à la salle de bain lorsque deux policiers débarquent chez Victor Carl pour lui annoncer que Wren Denniston, le mari de son ex-fiancée, a été tué à son domicile. Pas besoin de lui faire un dessin pour comprendre qu’il est l’un des premiers sur la liste des suspects. Et dans une suite de développements tordus, il se retrouve à faire des pieds et des mains pour démentir les preuves qui pèsent contre lui. Victor Carl est victime d’un coup monté, est c’est flanqué de Derek – un de ses clients accusé de vente et possession d’héroïne qui se découvre une vocation de détective privé – ainsi que d’Antoine, une grosse tête de la communauté gangster jamaïcaine de Philadelphie, qu’il fonce pour découvrir le ou les vrais coupables.

Mais son amour aveugle pour Julia doublé de ce vague sentiment qu’elle ne lui dit pas tout n’aident en rien à faire avancer les choses.

Là où de nombreux auteurs échouent en appliquant un traitement léger tout en voulant maintenir le suspense, Lashner, lui, passe haut la main. Mais par léger, je veux simplement dire qu’on est loin de la lourdeur et de l’intensité propres à la mode scandinave, par exemple. Lashner ne vous fera pas éclater de rire, mais vous rirez en coin, vous rirez méchant.

La couverture, elle, donne plutôt envie de pleurer. Mélange douteux entre la pochette de la première saison de Six Feet Under et une campagne publicitaire de Black Label des années 90, elle ne m’a donné d’autre choix que de demander à ma blonde, qui est graphiste, de me concocter une nouvelle jacquette, question de pouvoir lire en public avec l’esprit tranquille. Tant d’occasions ratées de faire de belles couvertures, et ma blonde qui a un goût aiguisé et un talent fou…

Quoiqu’il en soit, repose-toi bien, Victor Carl. Panse tes blessures, prend un bain chaud, fais-toi plaisir et reviens-nous en santé. Moi je serai là, fin prêt, et en grande forme.

(Critique écrite pour Alibis, printemps 2009)

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