dimanche 24 avril 2011

Le vengeur des catacombes, de P.J. Lambert


Fayard, 2007, 440 p.

Badineries et pédophilie

Rien, au départ, n’inciterait un adulte sérieux à arrêter son choix sur Le Vengeur des Catacombes, si ce n’est la bande rouge le proclâmant récipiendaire du prix du Quai des Orfèvres 2008. Le titre racoleur, l’illustration de couverture, criante de mauvais goût, et la taille exagérée des caractères évoquent davantage un mauvais roman d’épouvante pour adolescents. Heureusement, ce livre est meilleur qu’il n’en a l’air.

Les catacombes en question, ce sont les nombreuses galeries qui forment le Paris sous-terrain où l’on retrouve rangés côte à côte, le 16 juin à 2 heures du matin, deux cadavres en décomposition auxquels on a soigneusement tranché la tête et les mains. L’enquête est confiée au capitaine Amélie Boursin, de la brigade criminelle, une femme pour ainsi dire parfaite, rousse canon, entêtée, et qui sait prendre les coups. Sous les conseils de son patron, François Simeoni, Boursin mène l’enquête avec le turbulent journaliste David Meyer, un ami d’enfance de Simeoni. C’est que Meyer se spécialise dans le criminel et travaille de façon indépendante, et même si on a pu, au fil des années, le qualifier de « fouille-merde » ou de « cure-poubelle », son professionalisme et son efficacité ne font plus aucun doute.

Meyer est une grande-gueule. Romantique et charmeur bidon, il reste néanmoins attachant, et pire que tout, il le sait parfaitement. Je ne brûle rien de l’intrigue en vous disant que le journaliste ⎯ tout en restant professionnel ⎯ mettra sa vie en branle pour que la belle capitaine s’entiche de lui. Prévisible. Mais Meyer est déterminé de tous les côté, et c’est une superbe collaboration de la presse avec les forces de l’ordre qui nous est présentée ici, tant au commisariat que dans le lit .

L’enquête est lancée, avec pratiquement aucune information en poche, et le lecteur progresse au fil des chapitres titrés par un indice de lieu et de temps (Paris ⎯ 17 juin ⎯ 11h30), évoluant tantôt au quart d’heure près, tantôt à intervalles de quelques jours. La piste mènera peu à peu à l’affaire Deschamps, vieille de quelques années, où un homme apprenait le viol brutal et le meurtre de ses deux jeunes filles par un pédophile récidiviste, jugé apte à la libération après huit ans de psychiatrie. La publication anonyme dans les journaux d’une liste de maniaques sexuels en liberté vient raviver le sujet et enflamme la population française.


La narration nous raconte l’histoire soit à la troisième personne, soit à la première, via la voix de David Meyer lui-même, et c’est là que ça se gâte un peu. Je veux bien d’un personnage qui s’auto-magnifie, mais les lois du narrateur omniscient doivent cependant être mises de côté dans ces cas-là. Ainsi, Meyer n’hésite-t-il pas à se décrire physiquement, à nous vanter son caractère, à parler de lui à la troisième personne et à nous détailler la décoration de son salon, le tout ponctué d’un nombre audacieux de points d’exclamation.

Le ton badin de l’écriture de Lambert rend la lecture certes très rapide et facile, mais les nombreux traits d’humour sont souvent convenus ou tombent à plat. L’enquête est cependant plutôt bien menée et documentée, et le sérieux du sujet prend heureusement le dessus sur les fôlateries évasives du protagoniste.

Il m’est avis qu’avec un peu plus de rigueur, le personnage de David Meyer aurait pu être drôlement plus percutant et maîtrisé. En espérant le voir mûrir dans les prochains efforts de P.J. Lambert qui, comme la plupart des récipiendaires du prix du Quai des Orfèvres, était jusqu’à présent inconnu au monde de la littérature (il est consultant financier international). Souhaitons-lui une nouvelle carrière…


(Critique écrite pour Alibis, hiver 2008)

Aucun commentaire: