dimanche 24 avril 2011

Trop de mains dans le sac, de Charlie Huston


(Caught Stealing, 2004)
Seuil Thriller, 2008, 268 p.

Tout ça à cause d’un chat


Je n’arrive toujours pas à comprendre comment, en librairie, j’ai pu être interpellé par ce livre à la couverture de mauvais goût et au titre douteux. Mais je crois bien que c’est le nom de l’auteur qui m’a retenu. Je me suis dit qu’avec un nom pareil, Charlie Huston ne devait pas être un gentil. Et, voyez-vous, j’avais raison.

Paru en 2004, ce premier roman de Huston a été suivi – outre les scénarios de la bd Moon Knight chez Marvel – de six autres livres, dont deux s’inscrivent à la suite de celui-ci, mettant en vedette Henry Thompson, barman chez Paul’s, alcoolique et sans ambition depuis qu’une blessure a mis fin à une prometteuse carrière de baseball.

C’est un Thompson bourré qui va répondre à la porte un matin pour y trouver son voisin, Russ, qui lui demande de garder son chat alors qu’il doit aller voir son père à l’hôpital. Pas particulièrement amoureux des animaux, Henry accepte quand même et reçoit la cage de transport qui contient la bête, ainsi que le nécessaire pour sa survie. Seulement, il ne sait pas à ce moment que dans la cage en question est caché un objet qui compromettra sa survie à lui. Une simple clé, scotchée sous la couverture du chat. Il ne la trouvera qu’après que des « amis » qui cherchent Russ soient venus et lui aient fait subir toute une râclée, au point qu’il doive se faire retirer un rein déjà mal en point.

Gérer un chat qui n’est pas le sien, vivre avec un rein en moins, supporter son corps sur ses pieds douloureux et devoir ignorer les bouteilles de bière qui vous font de l’œil serait une situation fâcheuse pour n’importe qui. Mais des gangsters qui défilent chez lui avec fracas pour trouver Russ, Thompson aurait bien pu s’en passer. Il aurait aussi pu se passer de leur dire qu’il avait trouvé la clé. Leur répéter qu’il ne se rappelle plus où il a pu la mettre parce qu’il était bourré ne change rien aux baffes qu’il reçoit, à la chaussette qu’on lui a foutu dans la gueule, à sa plaie d’opération qu’on ouvre pour aller zigonner dedans. Un gang de bandits dirigé par un inspecteur de police, la mafia russe, deux frères noirs psychopates, ils sont nombreux à être sur le dos de Thompson qui décidément n’aide en rien à sa convalescence, quoi qu’il puisse dire à sa mère.

Mais lorsque plusieurs de ses amis meurent dans une fusillade chez Paul’s, Thompson la trouve de moins en moins drôle. Accusé à tort de ces meurtres et vivement recherché par la police, il deviendra meurtrier pour vrai alors qu’il décide de prendre les choses en main. Et ce, toujours avec le chat dans les bras, qui doit maintenant avaler des médicament pour guérir d’une patte qu’on lui a cassée par pure malice.

Trop de mains dans le sac est un roman violent et explosif, dans la tradition des meilleurs romans noirs et des films de Tarantino. Explosif au point où on a souvent l’impression d’être dans la scène finale. Avant même d’avoir franchi le cap des cent pages, on se demande déjà comment ça pourra aller plus loin, et pourtant, Thompson s’enfonce encore et encore. Peut-être un peu trop, par moments, mais pas assez pour en faire un plat. On se délecte des personnages exubérants et des dialogues incisifs, qui doivent être géniaux, en langue originale… Un pulp moderne, un roman drôle et sanglant, avec une bonne quantité de méchants, et un gentil qui n’a d’autre choix que de devenir méchant pour s’en sortir. On veut la suite, et vite.


(Critique écrite pour Alibis, été 2008)

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