samedi 1 novembre 2008

Le diable par la queue, suivi de Pourquoi écrire? de Paul Auster




(Hand to Mouth, Why Write? 1996)
Actes Sud, 1996, 174 p.

Peu importe à quel point je puisse en venir à aimer un auteur, il m'est plutôt rare d'entreprendre deux de ses livres un à la suite de l'autre. Peut-être par peur de trop m'immerger et de perdre du coup tout ce qui peut se passer à côté, dans la vraie vie. Vous me direz que c'est s'en faire beaucoup avec très peu, mais je vous répondrai que la vie est faite de petits cossins comme celui-ci, qui régissent notre existence avec autant d'aplomb qu'une catastrophe, que l'amour ou un changement de carrière. Seulement, ça se passe d'une manière un peu plus insidieuse. Quoi qu'il en soit, comme l'évoquait Dickner dans une de ses chroniques, je suis davantage « butineur » que « collectionneur ». Je butine les auteurs et quand un me plaît bien, je m'en éloigne afin de mieux y revenir.

J'ai presque fait faux pas à ma règle avec Paul Auster cette semaine. J'aurais fait un vrai faux pas si je m'étais lancé corps et âme dans un autre roman du même acabit que Moon Palace, mais je doute d'en être capable. Malgré tout mon respect et mon admiration, j'aurais eu le sentiment de passer à côté de quelque chose, sachant que l'--uvre d'Auster tourne généralement autour des mêmes thématiques.

Ce faux faux pas, donc, je l'ai fait en pilant dans ce petit livre, presqu'un livret, qui réunit deux textes d'Auster d'abord publiés séparément. Sur le ton du récit, avec une franchise et une honnêteté toutes simples, Auster raconte dans le premier texte son rapport torturé face à l'argent et l'obligation d'en gagner. D'abord, l'argent est l'élément qui sépara ses parents qui, en dehors de cette malheureuse thématique, s'entendaient à merveille. Une mère dépensière et un père économe élevèrent un fils ambigu, qui ne sut jamais prendre parti.

Auster décida très tôt de gagner sa vie de façon indépendante, tout en sachant pertinemment qu'il n'empruntait pas les voies de la richesse. Subvenir à ses besoins sans rien devoir à personne, là était son idée principale. Seulement, il n'a pas toujours été aussi simple de subvenir à ses besoins et c'est avec un grand plaisir que nous suivons l'auteur à travers ses divers emplois et tentatives pour faire de l'argent, reprenant notre souffle avec lui alors que des bourses inattendues tombent du ciel, nous remettant à la course avec lui lorsqu'elles sont épuisées. De l'enfance jusqu'à la publication de son premier roman, des mois passés à travailler sur un pétrolier jusqu'à ses errances en Europe, Le Diable par la Queue est une brève autobiographie passionnante qui se traverse en un rien de temps. La version originale compte en annexe des transcriptions des premières fictions d'Auster dont il est question dans le texte.

Pourquoi Écrire? Comporte cinq courts textes de deux à quatre pages. Cinq histoires ou anecdotes n'ayant apparemment aucun lien entre eux. Peut-être un lecteur d'Auster confirmé pourra-t-il me donner une piste. Mais la dernière histoire serait le réel embryon du pourquoi Auster serait devenu écrivain, et c'est très certainement là la manière la plus singulière d'en venir à l'écriture.

(Originalement publié le 18 septembre 2007)

Aucun commentaire: