samedi 1 novembre 2008

Moon palace, de Paul Auster




(Moon Palace, 1989)
Actes Sud, 1990, 317 p.


De Paul Auster je n'avais lu que Cité de Verre il y a très longtemps. Trop longtemps pour que je me rappelle de quoi il s'agit, et surtout, trop tôt dans mon expérience de lecteur pour en retirer un quelconque enseignement. Et sans vraiment savoir pour quelle raison, Auster a été mis de côté pendant de longues années. De longues années où j'étais convaincu que j'aimerais Auster, mais pas de là à concrétiser une quelconque action. Puis ma blonde cette semaine m'a fortement convaincu de m'y lancer (pas que j'aie vraiment offert de résistance) et voilà, je l'ai déjà terminé. Ça fait du bien de se rappeler qu'on est capable de clencher un livre, même si, comme celui-ci, il s'agit de 300 pages tassées, avec très peu de dialogues et aucun espace entre les paragraphes. Mais la profondeur de l'histoire fait oublier ces détails décourageants à première vue.

J'ai bien cru remarquer que la solitude est le thème principal de l'oeuvre d'Auster. En ce sens, je crois bien que Moon Palace se situe dans ses oeuvres classiques, dans celles qui donnent une très bonne idée de ce que ça peut être, que de lire Auster.

M.S. Fogg a perdu sa mère, renversée par un autobus. Il y a longtemps de cela, au point où il n'a même plus d'image mentale d'elle. Plus une impression qu'autre chose, même pas de photo. Il ira vivre avec son oncle Victor, la seule famille qu'il lui reste. Il n'a jamais connu son père, même que sa mère n'en a jamais divulgué l'identité à qui que ce soit et s'est réfugiée dans une folie hermétique après la naissance de M.S.

À la mort de Victor, M.S. se retrouve seul avec les milliers de livres que son oncle lui a laissés. Ils constituent son seul bien réel, et les boîtes assemblées de diverses façons forment son ameublement. Déprimé, il délaisse pratiquement toutes ses occupations pour se mettre à la lecture des livres de son oncle. Sans discrimination aucune, il ouvre une boîte, saisit un livre, le lit, et passe au suivant pour finalement aller les vendre au fur et à mesure à un vieux libraire. Peu à peu, son mobilier s'épuise, ainsi que sa raison. M.S. finira par errer dans Central Park durant une longue période de folie avant d'être secouru par ses deux amis, Zimmer, un collègue d'études qu'il n'a pas vu depuis quelques années, et Kitty Wu, une fille qui s'est entichée de lui, qu'il n'a vue qu'une fois avant de déraper pour de bon.

M.S. se replace peu à peu, se refait à l'idée de pouvoir être aimé, apprécié, puis cesse de vivre de l'aide Zimmer et se trouve un emploi chez Thomas Effing, un vieil invalide aveugle, à qui il doit faire la lecture et la promenade. Effing, avec son sale caractère de vieux riche, lui donne du fil à retordre pendant longtemps, puis se noue une relation entre eux deux, relation qui amènera Effing, qui sent la mort proche, à raconter à Fogg sa réelle histoire, celle qu'il n'a jamais racontée à personne.

Si vous croyez que je vous ai raconté toute l'histoire, allez jeter un oeil, pour voir. Vous n'avez rien vu encore. Mais en dire plus, à ce moment, serait un peu déplacé.

Auster nous tiens en haleine, même lorsqu'on sent le récit dériver. Et dériver, le récit ne fait que ça. Loin de nous emmener où on pourrait le croire au début, l'histoire de Fogg devient celle des autres, de ceux qui sont mis sur son chemin par hasard, ou par destin, devrait-on dire. Rarement la solitude aura-t-elle été aussi bien sentie et décrite en littérature, en ce qui me concerne, du moins. Auster nous tient dans un genre d'immobilisme actif, où chaque manifestation de chacun des sens trouve son compte et son importance. Ça n'aura jamais été aussi impliquant de ne rien faire.

(Originalement publié le 14 septembre 2007)

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