dimanche 2 novembre 2008

Train, de Pete Dexter




(Train, 2003)
de l'Olivier, 2005

J'avais déjà ce livre depuis quelques années, je l'avais acheté surtout pour sa couverture, que je trouvais inspirante. Je ne lisais même pas de romans noirs, à l'époque. Et c'est juste maintenant que je me réveille, merde, pour découvrir Pete Dexter. Tout ce temps passé à faire autre chose.

Je ne suis pas certain si Dexter est toujours en activité. En date, Train est le dernier roman de Dexter (mis à part God's Pocket, son premier, qui vient d'être édité en français pour la première fois.) Et en quatrième de couverture, on annonce « le retour de Pete Dexter », qui n'avait rien écrit depuis 1995. Mais bon, des romans comme ça, ça ne s'écrit pas sur un base annuelle. Peut-être aussi qu'il se la coule douce, avec les revenus de son roman Cotton Point, devenu Rage, au cinéma, ou encore pour la série Deadwood, qui a pris son inspiration dans son roman du même nom, réédité récemment chez Folio Policier.

L'histoire de Train prend place dans les années cinquante. Mais mis à part le comportement raciste (raciste, mais aussi souvent peureux) de plusieurs personnages blancs, nous n'avons que peu d'indications sur l'époque. On se concentre principalement sur les personnages, et c'est bien assez comme ça.

Train, c'est le surnom qu'on a donné à Lionel Walk, un jeune noir de dix-huit ans. Il travaille comme caddie au chic club de golf Brookline. Train est à son affaire, ne parle que lorsque nécessaire, et se tient généralement loin de l'action. Seulement, c'est l'action qui le rattrape. Ce n'est pas de sa faute à lui si le copain de sa mère est un homme violent et qu'il doive se protéger. Pas plus que ce n'est sa faute si son supérieur immédiat, Sweet qu'on l'appelle, est tué dans un braquage raté de bateau, et que par mesure de sécurité, son patron décide de virer tout le personnel noir l'équipe.

Nous allons le suivre alors qu'il essaie de survivre du mieux qu'il peut, avec un, et peut-être deux cadavres dans le placard. On sent que Train est fondamentalement bon, et n'eût été le fait qu'il soit noir dans les années cinquante, jamais il ne serait pris dans ce merdier.

Parallèlement à l'histoire de Train, nous suivons celle de Miller Packard, un des personnages de roman les plus insaisissables qu'il m'ait été donné de lire. Policier à la morale douteuse, Packard a le don de se mettre là où ça se passe et de faire attirer l'attention sur lui. Pourtant homme de bon caractère, il adore être surpris, étonné, le lecteur sera parfois renversé par la tournure des évènements lorsque c'est Packard qui tient les rennes.

Les chemins de Packard et Train se croiseront, d'abord au début du roman, alors que Train est le caddie de l'adversaire de Packard. Le respect que Packard a envers Train donne espoir, tant au lecteur qu'au jeune noir. Puis Packard tombe amoureux de la survivante du braquage de bateau raté. Il retombera plus tard sur Train et l'invitera, lui et Plural, son ami aveugle, à venir habiter dans le cabanon dans sa cour arrière, à Beverly Hills. Lorsque Packard annonce à sa nouvelle femme d'où viennent les deux logeurs, pas besoin de dire que les souvenirs font surface et qu'elle est loin de trouver que son Miller chéri a eu une idée de génie.

Et durant leur cohabitation, Packard permettra à Train de s'entraîner au golf, chose qu'il faisait à l'époque, le matin, avant l'arrivée des clients. Il se trouve que Train est un sacré joueur et qu'ils visiterons de nombreux clubs, où Train insultera plusieurs blanc en les battants sur leur terrain, tout en gagnant des tas d'argent, chose qui lui était encore inconnue.

Écrit avec un style personnel et fort efficace, Train est un roman noir qui nous enfonce dans les psychologies de personnages troublés, qui sont mis en relation par des situations délicates et ambigües. Prenant, dur et angoissant, ce roman place Dexter sur la liste (toujours grandissante) des grands écrivains américains. Sans aucun doute un dossier à suivre.

(Originalement publié le 15 mai 2008)

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